Nous avons vu qu'une étoile de masse intermédiaire peut traverser jusqu'à trois phases de dragage. La première, lorsqu'elle devient géante rouge, la deuxième, lorsqu'est terminé son passage sur la branche horizontale (pour les plus massives [M4M]), et la troisième, lors des pulses thermiques sur la BAG.
Pour illustrer l'importance du dragage sur la composition chimique, voyons les changements d'abondance de carbone, d'azote et d'oxygène à la surface stellaire tel que décrit par Iben et Renzini (1983). Prenons le cas où le deuxième dragage est maximum, c'est-à-dire, le cas d'une étoile de masse initiale M = 8.95 et de métallicité Z = 0.02. Si la composition de surface des atomes de carbone, d'azote et d'oxygène était initialement de (C:N:O) = 0.50:0.17:1.00, après le premier dragage les proportions deviennent (C:N:O) 0.33:0.33:1.00. Et après le deuxième dragage, elles sont de (C:N:O) 0.29:0.52:0.86. L'azote rivalise en abondance avec l'oxygène tandis que le rapport C/O a diminué, mais toujours sous la barre de C/O = 1.
C'est seulement durant la troisième phase de dragage que le rapport C/O peut dépasser l'unité. À chaque pulse thermique, la réaction triple alpha dans la couche d'hélium y fait grimper d'un facteur dix la proportion de carbone si bien qu'un rapport C/O = 2 est atteint dans la couche d'hélium. La convection rapporte ces gaz à la surface qui voit par conséquent, elle aussi, son rapport C/O grimper. Il est plus difficile de quantifier le rapport C/O atmosphérique une fois que le troisième dragage s'opère. Les modèles sont très sensibles, par exemple, au taux de perte de masse causée par de puissants vents stellaires qui se développent à chaque pulse. Grosso modo, les valeurs possibles du rapport C/O varient d'un facteur 60. Une chose semble logique, c'est qu'une étoile qui passe du type M (C/O < 1) au type C (C/O > 1) doive transiter par un type intermédiaire, le type S (C/O 1).
En outre, la métallicité a certainement une grande influence sur le taux
d'étoiles C formées. On observe dans plusieurs galaxies du Groupe Local
un gradient du rapport C/M - c'est-à-dire du nombre d'étoiles C par
rapport au nombre d'étoiles M de type tardif. En principe, ces deux
populations sont au même stade évolutif et seulement leur rapport C/O
diffère. Les observations spectroscopiques montrent qu'on retrouve une plus
grande proportion d'étoiles C en périphérie des galaxies, là où la
métallicité est faible, qu'au milieu du disque, là où la métallicité est
forte. Par exemple, pour M31, la figure montre
comment varie le rapport C/M (Brewer et al., 1995). Les Nuages de
Magellan, dont la métallicité est plus faible que celle de la Voie
lactée, ont aussi une plus forte proportion d'étoiles C ``per
capita''. D'après Marigo et al. (1996), la faible métallicité favorise
la production d'étoiles carbonées de deux façons. D'abord, comme il y a
moins de métaux dans l'atmosphère, l'apport de carbone par dragage
incite plus rapidement le rapport C/O à dépasser l'unité. Ensuite, selon
leur modèle, la durée de vie sur la BAG (là où se produit le troisième
dragage) est plus grande pour les étoiles de faible métallicité.