Modèles d'avalanche des sous-orages géomagnétiques




Les orages géomagnétiques les plus intenses sont presque toujours déclenché par l'impact d'éjecta solaires sur la coté jour de la magnétosphère terrestre. Cependant, il existe une classe de perturbations géomagnétiques, les sous-orages, qui ne semblent pas corrélés avec la présence de forte perturbations dans le vent solaire. Les sous-orages sont des phénomènes fortement intermittent, donc une des plus spectaculaire manifestation (mais pas la seule) est la production d'aurores boréales (voir Figure 1), et originent du coté nuit de la magnétosphère.


Figure 1: Émission aurorale près du pôle sud, associé au développement d'un sous-orage magnétosphérique le 21 juillet 1993, superposée à une grille longitude-latitude géographique (plutot que géomagnétique). Image obtenue par le satellite DMSP, géré par le U.S. National Geophysical Data Center


L'image physique la plus simple d'un sous-orage est celle d'une libération soudaine d'énergie qui s'était auparavant lentement accumulée dans la magnétosphère en conséquence de l'inexorable travail fait par la pression du vent solaire. Le fait que cette libération soit si rapide et intense, tandis que le processus de stockage d'énergie soit lent et graduel, suggère que le phénomène implique une instabilité dissipative sujette à un seuil de déclenchement. Les estimés de l'énergie libérée par les sous-orages obtenue via les mesures d'émission aurorale ont révélé que ces énergies libérées se distribuent comme une loi de puissance en énergie, ce qui a conduit plusieurs auteurs à suggérer que les sous-orages sont un phénomène critique auto-régulé ("self-organized criticality", ci-après SOC) correspondant à des avalanches de reconnexion magnétique dans la queue de la magnétosphère. Nous avons développé un modèle SOC des sous-orages qui concentre "l'action" non pas dans la queue de la magnétosphère, mais plutôt dans le feuillet plasma équatorial situé plus près de la Terre, et où les mesures in situ placent l'origine des sous-orages (voir Figure 2, région identifiée comme la "Nightime Substorm Region"). L'idée de base est que les tubes de flux magnétique traversant le feuillet plasma équatorial sont graduellement étirés par le vent solaire, jusqu'à ce qu'ils deviennent instables par rapport à une ou plusieurs instabilités plasma. Ceci conduit alors à une libération locale d'énergie, qui est partiellement redistribuée aux tubes voisins, ce qui peut les faire dépasser à leur tour le seuil d'instabilité, redistribuant alors encore de l'énergie aux tubes plus éloignés, et ainsi de suite; une véritable avalanche! La simulatin numérique est définie comme un automate cellulaire où chaque noeud corresponds à un tube de flux, et la redistribution d'énergie est effectué selon des règles discrètes simples.



Figure 2: Une vue schématique et idéalisée de la magnétosphère terrestre, et de divers phénomènes pouvant s'y déclencher suite à l'impact d'un éjecta solaire du coté jour. Les surfaces bleutées sont les surfaces de flux magnétiques correspondant à la magnétosphère dans son état de base non-perturbé, résultant de l'interaction du champ magnétique terrestre avec la composante stationnaire du vent solaire. Image gif animée produite par l'équipe de la Magnetospheric Multiscale Mission de la NASA.

Travaillant à partir d'une version unidimensionnelle de ce modèle, représentant un segment du feuillet plasma coincidant avec l'axe terre-queue magnétosphérique, nous avons déjà pu démontrer qu'un tel automate cellulaire, forcé de manière lente et déterministe, peut produire des avalanches dont les tailles se distribuent en loi de puissance (voir Figure 3). Cependant, l'énergie "évacué" à l'extrémité Terre du réseau 1D présente une distribution de tailles caractérisée par une échelle bien définie, ainsi qu'un intervalle inter-événement également bien défini. Ces caractéristiques rappellent les profils quasipériodiques en dent-de-scie associés aux "injections" de particules chargées dans l'anneau de courant ionosphérique, une autre manifestation bien documentée des sous-orages.


Figure 3: Séquences temporelles d'énergie libérée par les avalanches intérieures au réseau (en rouge) et à travers la frontière coté terre (en vert). Les premières sont caractérisées par des distributions de tailles en loi de puissance, tandis que les secondes sont quasi-périodiques et présentent une distribution modale d'énergie libérée. Le diagramme du haut illustre l'évolution spatiotemporelle des avalanches, l'axe temps étant horizontal et coincidant avec celui des séquences temporelles. On remarque la grande disparité dans les tailles des avalanches internes (indiquées en rouge). Notez également le déclenchement d'une injection à la frontière Terre (indiqué en vert) par une avalanche originant de l'intérieur du domaine. Adapté de la Figure 2 dans l'article GRL par Liu et al. cité plus bas.


Ces résultats très encourageant, obtenus avec une version "démo" simplifiée du modèle, nous motivent à en poursuivre l'étude dans le cadre d'une version plus réaliste à deux dimensions spatiales. L'automate cellulaire 2D correspond maintenant à l'ensemble du feuillet plasma équatorial, que l'on suppose d'épaisseur infinitésimale. L'animation ci-dessous (voir Figure 4) montre un bref extrait d'une simulation 2D, incluant une grande avalanche à la frontière coté Terre. Cette version du modèle est suffisamment réaliste géométriquement pour permettre une comparaison détaillée des propriétés des avalanches (patrons de propagation, indice fractaux) avec les équivalents extraits des observations aurorales véritables.


Figure 4: Une simulation en deux dimensions spatiales du feuillet plasma équatorial. La Terre est situé vers la gauche, et la queue de la magnétosphère vers la droite. Les courbes de niveaux (en blanc) mesurent la densité d'énergie dans le feuillet plasma, et l'échelle de couleur encode l'énergie libérée localement lorsqu'un noeud du réseau devient instable au cours d'une avalanche. Cliquez sur l'image pour visionner une courte animation incluant une grande avalanche avec injection coté Terre (mpeg, 38MB).



Qui travaille là-dessus dans le groupe: Laura Morales, Paul Charbonneau, Michel-André Vallière-Nollet, Amélie Bouchat.

Il s'agit ici d'un projet de recherche en collaboration avec des chercheurs de l'Agence Spatiale du Canada, principalement William Liu et Jun Liang.


Publications récentes sur ce sujet par les membres du groupe:


   Dernières modifications le 10 octobre 2007 par

paulchar@astro.umontreal.ca.

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